Analyse |
Le
travail plastique de Lionel D. apparaît au premier degré comme un
système chaotique où le métissage des médias semble de rigueur. En effet, chacun de ses champs d’intérêt se constitue autour d'un tissage informe et complexe, d'un système quasi rhizomorphique où la perte de repère devient plus qu’une obligation, une nécessité. Que ce soit dans la composition musicale, dans le graphisme ou la peinture, on se trouve toujours confronté à une construction résultant de superpositions incessantes de couches qui s'accordent ou s'opposent suivant les directions créatives modulées par l'artiste. Cette mise en abime quasi névrotique n'est pas gratuitement stérile pour autant. Une fois le stade de la première confrontation dépassé, un dialogue peut s'engager. Les objets s'animent alors et des signes apparaissent en se métamorphosant sans cesse. Il n’est absolument pas question de dépassement ou de sublimation en ce sens où cette logique n'est qu'une des nombreuses manières de s'approprier ces peintures. Non. La dimension fractaliste de son exploration picturale devient éminemment plus pertinente, pas plus juste ou encore moins clairvoyante, juste plus pertinente. On assiste bel et bien à une rupture des repères conventionnels où plutôt à leur réorganisation où le temps est une caractéristique non négligeable que ce soit dans la poétique ou dans la réception. L'art contemporain semble de plus en plus hermétique, nécessitant toujours plus de notions pluridisciplinaires pour être appréhendé ce qui rend son approche de plus en plus complexe (ce qui crée un certain éloignement du grand public …) ; ainsi le champs de références potentielles est incommensurable ; de plus, les connexions entre les signes sont infinies : le nuage de subjectivité libéré est alors immense si bien que l'introversion devient une issue facile, chacun rendu à sa propre micro réalité interne hautement subjective, baignant dans son idiosyncrasie amniotique, face à son miroir, mais il faut aller au delà … C'est dans cette optique que l'artiste est présent physiquement, pour créer des passerelles entre les micro réalités individuelles, c'est dans cette optique qu'il travaille depuis plusieurs années, en s'efforçant de rencontrer des spectateurs de plus en plus nombreux. Tous les projets de l'artiste se présentent comme des propositions sensibles et conviviales qui recréent des échanges sociaux et culturels mettant en œuvre les notions d'hospitalité et d'identité. Parmi les qualités constitutives des œuvres de Lionel D. on trouve bien sûr la maîtrise des éléments formels et plastiques qu'il choisit pour rendre compte ou accompagner la relation : peinture, installation, performance, dessin, musique … mais aussi des convictions autour de valeurs humanistes, éducatives et inter-relationelles. Il propose ainsi d'enrichir la rencontre par la durée mais aussi par la diversité des situations qu'il participe à créer mais surtout à partager. A partir de ce moment là, des relations peuvent se nouer entre un public, une œuvre et un projet. C'est un espace de dialogue, un espace inter-humain. " L'art n'a pas attendu les années 90 pour s'émanciper des attentes formulées à son endroit, ni pour contracter avec le spectateur un pacte participatif. Mais il ne s'agit plus de demander à ce dernier de combler l'œuvre "ouverte" en collaborateur zélé, désireux de satisfaire le programme prévu par l'artiste. Non. L'enjeu est actuellement autrement dynamique : la production par le spectateur de l'œuvre dans l'utilisation des éléments proposés, ce qui ruine la croyance en un objet clos, en une unité célébrant la cohérence de la forme et du fond dans une tradition moderniste, et jette le doute sur la lecture traditionnelle des médiums " Paul Ardenne. " L'intervention doit être capable de transformer la structure en acte de communication " Gordon Matta-Clark. Floriant Benedetti |